La roue du devenir (Samsara)


Désir /Acte / Désir : la roue du devenir (Samsara)

karmaVivre est agir sans cesse. L’acte engendre l’acte (Karman). L’homme devient ce qu’il fait et récolte ce qu’il sème. Pour la pensée indienne, la racine de l’acte et surtout de la souffrance qui en résulte sans fin, est le désir qui fait éclater la conscience en un millier de buts à atteindre, l’écartant toujours plus du véritable but : la Réalisation (Samadhi : l’absorption dans le Soi).
« Quand l’on dit : Un tel est ceci, un tel est cela, c’est qu’on devient ce que l’on est en suivant ses actes, suivant sa conduite. Qui fait le bien devient bon, qui fait le mal, mauvais … L’homme de désir va, par la vertu du Karma, au but où son esprit est attaché … » (Bṛhad Aranyaka Upaniśad IV, 4, 5-6).
La graine du désir germe et fleurit sans trêve en lui et le pousse à travailler sans cesse la matière du monde et à s’y implique de manière toujours plus complexe. S’attachant toujours plus aux « fruits » de l’acte, qui libèrent à leur tour de nouvelles semences, il s’enchaîne ainsi indéfiniment à la noria des causes et des effets. Ce cercle infernal, en Inde, dépasse même la durée de la vie humaine : l’attachement lié aux actes est tel qu’il engendre des déterminations et des conséquences pour plusieurs vies successives.
La mort même n’est pas une solution à la souffrance, puisque l’homme renaît et qu’avec lui renaît la même problématique. C’est la roue de la transmigration (Samsara) : la conscience reçoit, de vie en vie, des imprégnations (vasana) qui la dispersent sans fin vers de nouveaux actes, de nouveaux buts, de nouvelles déceptions qui ruinent son âme. Car, en définitive, seule la Réalisation est capable d’étancher la soif (triṣna) de la conscience tant qu’elle n’est pas unie au Soi.
Le désir de l’Absolu est celui qui abolit tous les désirs, le seul qui n’engendre pas de « Karma », mais au contraire, contribue à le « brûler ».
Même si l’on n’adhère pas à la croyance, toute orientale, en la renaissance, le processus « karmique » lié à « l’attachement aux fruits de l’acte » reste valide sur le plan psychologique et moral. L’idée que les actes passés laissent des traces (Sāṃskara) dans la conscience et déterminent une part importante de notre conduite, maintenant et à l’avenir, n’a en soi rien de saugrenu. Il suffit d’observer notre vie en tentant de démêler le fil des motivations profondes de nos actes et de leurs conséquences, pour entrevoir l’imbrication vertigineuse des situations passées, présentes et futures.