Etymologie du mot Yoga


yin

L’étymologie du mot Yoga »

est d’emblée lumineuse. Dérivé de la racine «Yuj », il revêt deux sens principaux qui désignent à la fois son but et le moyen d’atteindre ce but.

Atteler, attacher (non comme le souligne Jean Varenne, des bœufs placides qu’on tiendrait sous le joug avant le labour, mais plutôt des chevaux fougueux d’un char de guerre avant le combat). Voilà le moyen : discipliner et maîtriser « l’attelage » avant de partir au combat. Mais lequel ? Pour l’esprit indien, le seul véritable combat de cette vie, c’est l’ultime combat pour la vie absolue : l’affranchissement de la mort elle-même, la « délivrance » (Moksha), l’immortalité. 
Lier, unir :
dans le geste d’attacher, c’est le geste de l’union qui est accompli simultanément   : deux parties qui étaient séparées se trouvent à présent unies en une seule. Lesquelles ? L’attelage et le char, maintenant placés sous le contrôle du conducteur, lui-même sous le commandement de son maître, roi ou seigneur. De quoi s’agit-il exactement ? Quel est cet équipage ? Cette image est classique dans la pensée indienne (on la trouve aussi chez Platon) pour désigner les différents plans de la conscience humaine : « Le corps est comme un char, le Soi (Atman) en est le maître, l’intelligence (buddhi) en est le cocher, l’Esprit (manas) joue le rôle des rênes, quant aux chevaux, ce sont les sens (indriya) : le monde est leur carrière. » (Kaṭha Upaniṣad 3.3).

Ce que propose le Yoga est donc de discipliner « le véhicule », de l’affiner dans ses divers aspects : perceptions et actions, à travers la sensorialité et la corporéité, émotions et pensées à travers le mental et l’intelligence en vue de la placer sous les ordres de son « maître », afin qu’il accomplisse sa volonté : c’est le Soi (Puruṣa / Atman), cette parcelle divine qui vit en nous, souvent muette et dissimulée, dans la « caverne du cœur ».

Il est donc à la fois, le moyen, la discipline (sadhana), qui met en jeu à travers les diverses pratiques, tous les niveaux de la conscience, et le but, l’Union au Soi, à cette étincelle divine présente en nous, au centre même de notre poitrine, comme un joyau.

Le Soi est la réalité la plus simple dont nous puissions faire l’expérience, et pourtant, nous en sommes, le plus souvent, comme séparé (en réalité, cette séparation est illusoire, elle est illusion même : celle de faire « deux » avec le Soi) car notre conscience se projette sans cesse au dehors et s’absorbe dans les objets du monde extérieur, perdant contact avec son véritable centre et laissant s’installer la croyance de ce que l’Inde appelle la « dualité » (dvaita) : sujet et objet, moi et toi … Cet état de conscience erroné est pourtant le partage de tous les humains « non-éveillés », luttant pour la vie dans un monde objectif qui résiste à leur désir de possession, de plaisir et de pouvoir … Pourtant, le Soi est la seule Réalité. Lui seul est réellement réel.